L’orthographe syntaxique

Orthographe syntaxique, connaissances et procédures

L’orthographe syntaxique concerne les marques d’accord en genre, en nombre et en personne. Elle repose sur la mobilisation de règles, qui demandent, pour pouvoir être comprises et mises en œuvre, une capacité d’analyse des mots dans le contexte de la phrase. Par exemple, pour accorder le mot “mur” dans “Les murs sont rouges”, l’élève doit non seulement connaitre la règle selon laquelle un nom s’écrit avec un “s” lorsqu’il est au pluriel, mais il doit aussi identifier le mot “mur” comme un nom et le relier au déterminant “les” qui indique le pluriel.

La maitrise de l’orthographe syntaxique repose ainsi à la fois sur des connaissances et sur des procédures.

En matière de connaissances, deux types d’accord sont à distinguer : l’accord dans le groupe nominal (déterminant + nom + adjectif), d’une part; et l’accord entre le groupe sujet et le verbe, d’autre part – les marques d’accord différant dans l’un et l’autre cas. Pour pouvoir accorder correctement un mot, l’élève doit donc être capable de l’insérer dans la chaine d’accord adéquate. Il doit également identifier sa classe pour choisir la marque d’accord qui convient (par exemple “-s” pour un nom vs “-nt” pour un verbe au pluriel). La procédure est complexe. D’autant plus que les marques d’accord en français ne sont, pour la plupart, pas audibles (ce sont majoritairement des lettres muettes).

Ajoutons à cela que les notions de genre et de nombre peuvent poser problème à certains élèves allophones dans la mesure où elles ne sont pas présentes sous cette forme dans leur langue maternelle.

Par où commencer ?

Selon le référentiel “Français Langues anciennes” (FWB, 2021), en fin de 2e primaire, l’élève doit être capable d’observer la règle générale de formation du pluriel des noms et des adjectifs en « s », ainsi que la règle générale de formation du féminin en “e”.  Les activités menées pendant les trois premières années du primaire doivent en outre l’amener, en fin de 3e, à pouvoir, en situation de production, accorder le verbe avec le sujet, accorder les déterminants en genre et en nombre, accorder les adjectifs en genre et en nombre. Comment atteindre ces objectifs tout en développant la capacité de l’élève à développer une réflexion sur la langue ?

Aux cycles 2 et 3, plutôt que de cibler uniquement la mémorisation et l’application de règles qui peuvent sembler abstraites, il importe de travailler sur le sens de l’accord. Et cela commence avec l’observation de l’unité “phrase” et l’étude des relations qu’entretiennent ses constituants. Il est ainsi possible d’analyser, en s’appuyant sur l’oral, la construction d’une phrase simple, parfois appelée “phrase à deux pattes” : on y distingue deux groupes, désignant respectivement “ce dont on parle” (le sujet) et “ce qu’on en dit” (le “reste de la phrase”). Sur cette base, l’élève sera ensuite amené à distinguer, dans “le reste de la phrase”, le prédicat et le complément circonstanciel de phrase.

La compréhension du principe de l’accord est également un préalable indispensable à la construction de l’orthographe syntaxique. Très tôt, l’élève est amené à observer, en situation de lecture, qu’il existe des liens entre les mots dans la phrase, et que certains mots prennent un “s” lorsqu’ils sont accompagnés d’un autre mot signalant “qu’il y en a plusieurs”. Il se familiarise avec les balles d’accord, qui matérialisent les relations entre les mots au sein d’un groupe. En situation d’écriture ou de relecture orthographique, cet outil devient vite un allié dans la correction de l’orthographe syntaxique. 

S'entrainer à écrire, à analyser et à corriger des phrases

Différentes activités permettent aux élèves de développer leurs compétences en orthographe syntaxique. Il est intéressant de commencer avec des textes courts et des activités brèves. Chez les plus petits, par exemple, il est possible de travailler 15 à 20 minutes par jour à partir de la dictée d’un groupe nominal, selon le dispositif de la phrase dictée du jour. Les élèves sont amenés à s’interroger sur la segmentation des mots au sein de ce groupe (ex. : “le joli castor”). La dictée d’une phrase amène ensuite des questionnements sur la majuscule et la ponctuation (ex. : “Il se cache sous le parasol.”) puis sur l’accord dans le groupe nominal (ex. : “Lilou aime les petits chats.”) et enfin sur l’accord sujet-verbe (ex. : “Les salades vertes poussent dans le jardin.”).

Lors de la gestion de telles activités, l’enseignant veille à désigner les constituants de la phrase avec la terminologie adéquate (“adjectif”, “pluriel”…) en en explicitant le sens. Il est en effet conseillé d’utiliser les termes exacts, sans les remplacer par des “synonymes” ou des métaphores (ex : “le copain du nom”, “le groupe bleu”…), qui peuvent sembler plus attractifs, mais sont en réalité susceptibles de générer des malentendus et de freiner la compréhension. 

L’enseignant invite également les élèves à verbaliser leurs démarches (“Comment as-tu fait pour écrire ce mot ?”) et à les confronter à celles des autres. Les élèves sont invités à garder des traces de leur raisonnement, en identifiant, par des balles d’accord, les donneurs et receveurs d’accord au sein de la phrase. Par exemple : l’élève entoure le déterminant pluriel et le relie avec les terminaisons du nom et de l’adjectif, pour se rappeler qu’il doit accorder ces derniers. Ces traces graphiques sont un étayage utile pour les élèves en début d’apprentissage. Les élèves les plus fragiles peuvent continuer à les mettre en œuvre dans toute situation de relecture orthographique aussi longtemps qu’ils en ont besoin, jusqu’à ce que cette procédure soit intériorisée.

Ces deux gestes d’étayage favorisent le transfert des stratégies dans de nouvelles situations d’analyse, d’écriture ou de correction de phrases.

Une fois qu’ils se sont entrainés sous le guidage étroit de l’enseignant, lorsqu’ils maitrisent les balles d’accord et sont capables de verbaliser leurs stratégies, les élèves peuvent être placés dans des situations plus complexes reposant sur une plus grande autonomie. La dictée négociée, par exemple, leur permet de réfléchir en petits groupes autour de la production et de la correction d’un texte.

Développer ses connaissances en s'amusant

Rien de tel qu’un jeu pour se mettre dans la peau d’un détective de la langue, structurer ses connaissances et s’entrainer. Le jeu Accords parfaits s’adresse à de jeunes élèves qui découvrent les chaines d’accord dans le groupe nominal. Tic Tac Verbes ! est un jeu coopératif visant à développer des connaissances sur l’accord du verbe et stimuler l’attention des élèves dans diverses configurations d’accord particulières.

Ces deux jeux reposent sur une phase de découverte et d’expérimentation, au cours de laquelle les élèves sont invités à verbaliser leurs stratégies et leurs observations. Celles-ci sont ensuite structurées en groupe-classe et formalisées par écrit. Sur cette base, les élèves peuvent s’entrainer en jouant à nouveau, par exemple dans le cadre d’ateliers différenciés.

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